Vue imprenable sur la Sorbonne Nouvelle
Chacun appartient au décor quotidien de l’autre. Un immeuble, classé ILM, est situé en face de l’université Sorbonne nouvelle Paris 3. Des étudiants curieux sont allés à la rencontre de leurs voisins d’en face.
Monique habite l’immeuble depuis 21ans. Elle est née dans ce quartier du 5èmearrondissement. Après avoir attendu quatorze longues années, fait de multiples démarches administratives, elle est enfin devenue locataire de l’appartement 321, bâtiment A. Habiter en face de la fac ne lui laisse aucune intimité. « Vous les étudiants, vous passez votre temps à regarder par ici, on ne peut pas se balader à poil ! ». Le seul problème serait le vis-à-vis car le bruit importe peu à Monique, petite femme pêchue de 54 ans. « J'adore le monde, je trouve ça génial, ça met de l'animation dans le quartier ». Le côté fête et jeunesse lui plait particulièrement. Sinon elle aurait opté pour une « île déserte ».
Concernant la copropriété, elle se sent comme un membre d’une grande famille ; tous les locataires se connaissent bien. Mais pourtant il n’est pas question de créer quelque chose pour la communauté. Une éventuelle salle de jeu, un potager, une parcelle de culture commune ? « On a refusé cette idée, cela va nous amener des soucis, du vol, des personnes qui voudront dégrader les installations. »
Seul évènement qui fait l'unanimité: la fête des voisins. Une grande table installée dans la cour de l’immeuble, des assiettes remplies de bonnes choses préparées, quelques bouteilles de vin et les festivités durent jusqu’au bout de la nuit.
Mme Benhamou, mariée, un enfant, occupe un trois-pièces avec son mari et son fils adolescent au cinquième étage du 19, rue Censier, depuis quatre ans. Ils y ont emménagé après « plus de huit ans sur la liste d’attente », lorsque les précédents locataires de l’appartement qu’ils occupent, un couple de Corses, sont repartis sur l’Île de Beauté à la retraite. Sinon, les Benhamou auraient probablement attendu encore plus longtemps ! Eux-mêmes originaires du sud de la France, ils n’envisagent pas de « lâcher » leur appartement, sauf s’ils quittent Paris pour retourner vivre dans le midi. Car le loyer qu’ils payent, bien plus bas qu’en locatif privé, vaut bien que l’on s’accommode des menus inconvénients de leur cadre de vie : les murs sont minces, donc si les voisins font du bruit, on les entend. Sans parler, bien entendu, du voisinage bien peu discret des étudiants de l’université de Paris 3, juste en face. « C’est beaucoup mieux quand c’est les vacances. En juillet-août, on est vraiment au calme. Mais le soir, quand vous sortez tous des cours, le bruit est énorme ». Du coup, il n’est pas rare que les appartements ne se libèrent qu’au décès de l’occupant.
Depuis son balcon que verdissent des citronniers en pot, qui lui rappellent le midi, Mme Benhamou, salariée dans le service logistique d’une « société de mobilier contemporain haut de gamme », mariée à un « directeur financier dans une société dans le Sentier » révèle qu’il n’y a pas de complicité particulière entre les occupants de l’immeuble. Tout juste des relations courtoises de bon voisinage. Mais chacun reste chez soi. On se croise, on se dit bonjour, sans plus. L’harmonie, la connivence que l’on croit deviner en observant ces rangées de balcons fleuris, n’existent pas. Mme Benhamou parle effectivement avec sa voisine de balcon : « on se penche sur le balcon et on parle de plantes et de chats, car nous avons toutes deux des plantes et un chat noir ». Mais cela ne va pas franchement plus loin. Alors oui, elle verrait d’un bon œil l’installation de structures collectives, dans « ces grandes salles sous-utilisées au sous-sol ». Cela permettrait aux jeunes, tous scolarisés dans le même collège, de faire du sport ou des jeux ensemble, et amènerait les parents à se rencontrer et à mieux sympathiser. Mais tout cela n’est pas encore à l’ordre du jour.
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